Je regrette grandement le départ d’Emmanuel Maurel avec qui j’ai beaucoup de points d’accord et quelques points de divergence implicite. Il résumait sa ligne idéologique ainsi hier dans Le Monde : « Notre fil rouge, c’est la République sociale. Promouvoir la laïcité, défendre les services publics, l’égalité des territoires, un modèle social de qualité, faire vivre la souveraineté populaire… Privilégier le commun sur le particulier. On doit faire la synthèse avec les luttes nouvelles, à commencer par l’écologie. » Comment ne pas adhérer à cette position ?
Je regrette son départ pour deux raisons principales :
1/ Le paysage syndical nous montre quotidiennement à quel point la division est efficace … pour le camp d’en face. Reproduire un tel émiettement dans l’hémisphère gauche du paysage politique ne peut conduire à un résultat différent.
2/ La France Insoumise dont Emmanuel Maurel se rapproche porte quelques idéaux nécessaires (François Ruffin l’a encore montré en fin de cette semaine dans son excellente intervention à l’AN) mais porte aussi deux risques majeures : (a) la personnalité de son leader actuel (on l’a vu à Marseille « éteint » face à Macron, on voit régulièrement ses sympathies pour les « hommes forts » d’Amérique latine, etc.) et (b) l’éclectisme inquiétant de sa base militante (racialisme et communautarisme des soutiens d’Obono ou sans-frontièrisme irresponsable des soutiens d’Autain) qui constitue une réelle bombe à retardement pour LFI, la gauche et le pays.
Bref, loin de toute acrimonie, des regrets et plus que des doutes sur la stratégie adoptée. Et surtout une inquiétude de plus en plus confirmée pour l’avenir du pays et du monde : en période de développement sans limites des inégalités et en période de replis identitaires, une réponse républicaine de gauche est une absolue nécessité sinon l’alternative sera en toute logique le national-populisme qui se développe partout où la gauche s’est effritée par ses divisions ou par sa transformation néolibérale et/ou communautariste.
Bassem Asseh 