Ceci n’est pas une critique d’Emmanuel Macron. Au contraire, j’y loue une de ses « qualités ».
Il est donc prévu que la taxe d’habitation disparaisse pour, dit-on, 80% des Français — en fait bien moins, car il y a déjà des mécanismes d’exemption liés aux niveaux de revenus. La taxe d’habitation est une taxe et, comme toute taxe qui se respecte, elle n’a pas bonne presse. Donc sa suppression ravit les contribuables. Néanmoins, tout affreuse qu’elle soit aux yeux du contribuable, cette taxe contribue au financement d’un paquet de services et d’équipements que la municipalité réalise pour le bien des citoyens. Je fais simple, car ceci n’est pas un cours de finances publiques locales : crèches, voirie, écoles maternelles et primaires, équipements sportifs, etc.
Et comme une municipalité ne peut pas se passer, d’un seul coup, de l’argent que génère la taxe d’habitation : le président et son gouvernement ont prévu de compenser la première année de la suppression de ladite taxe par une dotation équivalente. Une dotation c’est l’argent de l’état prend sur son propre budget pour financer une partie de ce que font les municipalités. Donc ce que le contribuable ne mettra pas dans le budget de la municipalité pour financer l’action de sa mairie, il le paiera quand même, mais cette fois-ci de manière indirecte en passant par le budget de l’état. Ce n’est pas un simple tour de passe-passe comptable pour deux raisons : (1) le contribuable aura réellement une taxe en moins dont il n’aura plus à s’acquitter et (2) l’état pourra décider tout seul d’augmenter ou de réduire cette dotation.
Et c’est là que le bât blesse ! Les dotations de l’état aux budgets des collectivités ont déjà été réduites sous les gouvernements Hollande et il est prévu qu’elles le soient à nouveau sous les gouvernements Macron. Donc au-delà de la première année de compensation de la taxe supprimée, on peut logiquement s’attendre à une réduction de la dotation compensatoire pour les années suivantes. Et je ne prends pas trop de risque avec une telle spéculation : Hollande comme Macron — à tort ou à raison telle n’est pas la question ici — sont engagés dans le respect des règles européennes d’équilibre budgétaire autorisant un maximum de 3% du PIB de déficit budgétaire au niveau global de l’état. Ainsi pour atteindre et maintenir ce niveau de déficit public — 3% du PIB — chaque « branche » de l’état — dont les collectivités territoriales telles les municipalités — devra faire les efforts nécessaires dans ses dépenses pour contribuer à la réduction des dépenses publiques et donc contribuer à l’atteinte et au maintien du niveau de déficit public dans la limite des fameux 3% du PIB.
On voit donc que derrière le faux « chevalier blanc » qui annonce vouloir réduire la pression fiscale de manière tout à fait séduisante pour les contribuables, il y a en réalité un véritable « prince machiavélien » qui veut se servir de la fausse réduction de la pression fiscale pour améliorer ses marges de manoeuvre dans la réduction des dépenses publiques — tout à fait réelle celle-là — considérées par la doxa néolibérale comme un mal absolu. Astucieux !
Et naturellement, j’espère avoir tort : l’avenir nous le dira…
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