#EP2014 : la victoire (de la gauche) ou la mort (de l’Europe)

Le titre paraître excessif à bien des lecteurs, mais à force de dire du mal des idéologies, on a fui les idées politiques et on a fait de l’Europe une instance technique dans laquelle le citoyen ne se reconnaît pas.

Ce printemps a été l’occasion de se pencher sur l’état de l’Europe… D’abord parce que les élections européennes sont une occasion unique pour tout un chacun de s’intéresser au projet européen. Mais aussi parce qu’après une Europe en prise avec une crise des finances publiques, inégalée jusque-là, l’Union est aujourd’hui soumise à la question « qui tue » : tout ça pour ça ?

Le contrôle de gestion n’est pas une politique

Si le seul horizon européen offert aux citoyens des différents pays composant l’Union est un tableau de bord de gestion des finances publiques, il ne faudra pas être surpris de voir les électeurs se détacher progressivement de l’Union et de son parlement. Si à aucun moment, ils n’ont le sentiment que leurs inclinations politiques, et non techniques, sont représentées dans les listes qui s’affrontent dans cette compétition électorale, il ne faut pas, là non plus, venir se plaindre en voyant des résultats de la participation plus faible encore que ceux de 2009 : 43% pour l’ensemble des 27 pays et 40,6% en France, en chute (presque) libre depuis 1979, date de la première élection européenne.

Le projet européen, vu de la fenêtre de beaucoup de nos concitoyens est devenue soit une absurdité soit une technique de comptabilité publique. Pour nous inciter à voter, on nous parle le plus souvent de la paix que l’Europe est censée avoir favorisée. A aucun moment, ceux qui usent de cet argument, ne doute de leur raisonnement ! A aucun moment ils se disent que la concomitance de deux phénomènes n’implique pas nécessairement un lien de causalité et, si tant est que ce lien existe, est-il dans un sens ou dans l’autre (l’histoire de la poule et de l’oeuf) ! L’autre argument qu’on nous assène le plus souvent est un ensemble d’indicateurs dont la technicité n’est plus compréhensible, même par les politiques eux-mêmes : la preuve la plus flagrante, à titre d’exemple, est la sacro-sainte règle des 3% dont tout le monde parle et qui n’est pas tout à fait rationnel, au moins dans son origine.

Un scrutin plus utile qu’à l’habitude

Est-ce à dire qu’il ne sert à rien de s’intéresser à la question européenne ? Évidemment que non puisque notre avenir, qu’on le veuille ou non, est en partie en Europe ne serait-ce que dans la mesure où le navire lancé ne peut tout à coup s’arrêter ! Est-ce donc à dire qu’il ne sert à rien de voter aux prochaines élections européennes ? Évidemment que non là aussi et même bien plus que jamais, car pour la première fois, le scrutin européen permettra de mettre à la tête de la Commission européenne un représentant d’une force politique qui sera sortie victorieuse du scrutin du 24 mai. Pour que l’élection soit attrayante, il faut qu’elle soit utile (et cela ne concerne pas que le Parlement européen) : non seulement la liste pour laquelle je vote doit représenté à peu près mon point de vue mais en plus mon vote doit, si mon choix sort gagnant, avoir un effet lisible sur mon avenir.

On ne peut donc pas se lamenter de l’absence de dimension politique compréhensible par l’électeur dans les enjeux européens et en même temps se contenter de l’abstention. On ne peut pas rationnellement se plaindre face à cette « première fois » qui autorise la désignation d’un dirigeant personnifiant l’Europe sur la base des résultats du vote des peuples européens.

L’électeur aura donc le choix entre deux grands candidats et une multitude de plus petits. Dans un vote libre, les peuples européens sont appelés à choisir l’orientation politique qu’ils veulent donner au projet européen.

Entre compromis constructif et compromission fatale

Alors oui, il y aura des compromis à trouver parce que le tropisme des Français de gauche n’est pas nécessairement identique à celui des Allemands de gauche. Il n’en reste pas moins que la politique peut reprendre le dessus sur la technostructure à Bruxelles si celui qui arrive en tête accède à la présidence et met en oeuvre un projet politique défendu durant de longs mois devant des électeurs qu’il aura réussi à convaincre sur le fond ls incitant à voter et les incitant à voter pour lui, du moins pour son projet politique.

Mais si le compromis entre les tropismes d’un même ensemble (la social-démocratie) devait devenir un compromis entre deux tendances opposées (la social-démocratie et le conservatisme) alors le résultat serait catastrophique, car alors, les peuples auront raison de se sentir trahis et ils auront raison de voir en l’Union européen un « machin » qui n’a aucune substance politique.

Un horizon démocratique sinon rien

Dans un excellent texte d’août 2012, Frédéric Ménager-Aranyi rappelle qu’il est urgent d’établir « des formes accrues de souveraineté populaire au niveau européen », car c’est ainsi « que l’on résoudra nombre d’antagonismes institutionnels ». Il dessine ainsi un horizon nécessaire :

Certaines fonctions importantes de hauts dirigeants européens ne devraient ainsi plus relever de la nomination, mais de l’élection directe.

Il s’agirait ainsi d’abolir en Europe la distance entre la source de légitimité du droit que sont les peuples rassemblés et cette machine à produire des normes et des règles qu’est l’Union européenne.

L’Europe sera ainsi rendue plus attirante et mieux comprise, car elle deviendra un lieu d’exercice de la souveraineté et non plus un facteur d’éloignement démocratique.

Il est donc urgent de ne pas s’abstenir le 25 mai 2014, car c’est là que se jouera l’avenir de la commission européenne : soit elle prend une orientation politique clairement définie et alors elle peut espérer reconquérir les peuples européens, soit elle fait une rechute technocratique des suites d’une coalition liant la droite à la gauche perdant ainsi (à jamais ?) le lien avec les citoyens.

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