Solidarité et solidité ont la même racine étymologique. Etre solidaire les uns des autres c’est être interdépendants :
- ce qui affecte l’un affecte de fait l’autre
- la fragilité de l’un génère une fragilité de l’ensemble,
- la fragilité de l’une des composantes réduit la solidité de l’ensemble
C’est autre chose que la charité dans le sens profane du terme. C’est autre chose que la générosité. Il ne s’agit pas d’une vertu individuelle. Il s’agit d’une vertu collective : une vertu qui crée le collectif, qui sert un intérêt commun.
Or le collectif, le commun, ça n’existe et ne perdure que s’il est solide. Il n’existe que si les composantes sont solidaires les unes des autres.
Créer la chose commune
En ce sens, si la République est la chose commune, celle qui nous appartient en nom collectif, alors la solidarité devrait en être une vertu cardinale, une caractéristique essentielle.
Or le dialogue citoyen, tel que nous le concevons et pratiquons dans cette ville, est une méthode qui permet de créer cette chose commune. Le dialogue citoyen permet de créer du collectif.
Ce n’est pas un hasard si la devise qui a été choisie pour accompagner le dialogue citoyen sur le web et dans nos communications papier c’est « jouons collectif« . Or comment jouer collectif sans créer de la solidarité au travers de cette méthode que nous appelons dialogue citoyen ?
Deux objectifs sont fixés au dialogue citoyen nantais :
- l’efficacité de l’action publique
- le renforcement du lien social, sa solidification si j’ose dire
Nous associons tous les citoyens des onze quartiers nantais, dans la diversité de leurs parcours, à l’identification des besoins nouveaux et, aussi, à l’imagination des solutions nouvelles.
Solidarité par la santé publique
A titre d’exemple dans les quartiers populaires — dits « prioritaires de la politique de la ville » — nous mettons en oeuvre des ateliers citoyens comme à Bottière ou à Bellevue, ou encore des conseils citoyens comme à Malakoff ou à Nantes Nord. Tout cela renforce le lien social entre habitants qui travaillent ensemble sur des projets communs pour rendre solide leur environnement immédiat.
A titre d’exemple encore : le travail collectif mis en oeuvre à Nantes Nord dans la conception de la future Maison de santé.
Elle sera sans doute en plein cœur du quartier Nantes Nord. L’initiative vient des professionnels de la santé eux-mêmes, suivie de près par les habitants du quartier aidés par l’équipe de quartier et bien sûr les élus : Pascal Bolo en tant qu’adjoint de quartier et Marie Annick Benâtre en tant qu’adjoint chargé de la santé publique. La maison de santé hébergera les professionnels : médecins, chinés, infirmiers, sages femmes, etc. Cette solidarité entre habitants et professionnels de la santé permet de lutter contre une médecine deux vitesses.
Solidarité face à la précarité énergétique
Un autre exemple de solidarité qui se met en œuvre au travers du dialogue citoyen : je citerais la lutte contre la précarité énergétique qui se fait notamment au travers du Grand Débat sur la Transition Energétique. Les coûts directs et indirects liés au logement sont une partie importante du budget des ménages. Et dans ces coûts l’énergie compte pour beaucoup : prix de l’énergie croissant, parc résidentiel vieillissant.
La transition énergétique influe fortement sur cet état de fait. Le Grand Débat permet de mettre en lumière l’importance des gestes du quotidien qui permettent de réduire la facture énergétique à la fin du mois. La « communauté des astucieux », dans le cadre du Grand Débat, rédige un guide des bonnes pratiques destiné plus particulièrement aux personnes en précarité énergétique.
On voit bien ici que la solidarité exprimée dans la lutte contre la précarité énergétique a un impact direct sur la solidité de l’ensemble de la société et même, dans ce cas précis, sur l’ensemble de la planète !
Solidarité des initiatives citoyennes
Notons enfin que les Bureaux des projets qui existent dans chaque quartier de la ville sont des lieux où émergent des initiatives citoyennes qui renforcent le lien social. Et certaines sont mêmes explicitement créatrices de solidarités actives.
Illustration typique de ce que je viens de décrire : fin novembre 2016, deux collectifs citoyens (Aidons notre prochain et Jeunesse nantaise en action) ont lancé avec l’aide d’un Bureau des projets un repas de Noël destiné aux sans-abris qui s’est déroulé le 25 décembre à Talensac en présence d’une centaine de personnes.
Solidarisme 2.0
Bref, je ne vais pas m’étendre plus avec d’autres exemples de dialogue citoyen qui renforce le lien social. Mais je voudrais rappeler une théorie un peu ancienne, un peu oubliée aussi. Et pourtant, elle a fondé notre société d’aujourd’hui : le « solidarisme » de Léon Bourgeois.
Jacques Julliard* définit ainsi le solidarisme : « un quasi-contrat entre l’individu et la société (…). Une solidarité fondée sur l’égalité ». Et plus loin :
Ce quasi-contrat se présente comme une théorie d’ensemble des droits et des devoirs de l’individu dans la société, mais aussi des obligations de l’Etat pour assurer l’égalité entre les citoyens, en recourant à l’impôt, à l’assistance sociale et à l’organisation des servcies publics »
Le dialogue citoyen s’inscrit dans cette logique du solidarisme dans le sens où nous mettons en oeuvre cette méthode qui permet à chaque individu de contribuer à la solidité de l’ensemble de l’édifice social.
* Les gauches française, Flammarion, 2012, p. 394