Le fantasme libanais de Morano

[Non, ce billet n’est pas une forme inversée des récents billets de Coralie Delaume sur les fantasmes politiques]

Dans le bruit qu’a généré la communication entre Nadine Morano et Gérald Dahan se faisant passer pour Louis Aliot, il me semble que personne ou presque n’a noté la réelle portée de la référence au Liban faite par Morano, portée dont elle n’était pas nécessairement consciente elle-même !

Dans le cours de la conversation, celle qui était encore à ce moment-là députée de Moselle évoque le « droit de vote des étrangers » que propose la gauche puis elle enchaîne :

J’ai pas envie que ça devienne le Liban chez moi.

Or le Liban pour les hommes et femmes politiques de droite qui ont eu une certaine activité dans les années 75-85, porte une charge affective incomparable. Nombre de Français de droite ont contribué d’une façon ou d’une autre à l’effort de guerre des milices libanaises chrétiennes (phalanges, forces libanaises, etc.). Leur vision de la première partie de cette guerre s’appuyait essentiellement sur une grille d’analyse confessionnelle. Pour eux, les Libanais chrétiens constituaient le dernier rempart de l’occident face à cet islam guerrier d’avant le 11-septembre, d’avant-Huntington, etc.

Ainsi lorsque Morano évoque le Liban dans une conversation qu’elle pense avoir avec un leader d’extrême droite, il s’agit pour elle de mettre l’accent sur des valeurs communes qu’elle considère comme liant l’UMP et le FN. Ces valeurs sont celles de la lutte contre l’islamisation de la société française d’aujourd’hui (libanaise d’hier).

Un écrivain de droite a fantasmé au possible cette relation de la droite française avec le Liban chrétien : Richard Millet dans sa Confession négative (Gallimard, collection Blanche, 2009) y raconte l’histoire d’un jeune corrézien (l’auteur lui-même ?) s’engageant auprès des phalanges et tuant, entre autres, des civils musulmans qui ont eu le malheur de croiser sa kalachnikov.

C’est ce fantasme qu’a mis en avant Nadine Morano lorsqu’elle a évoqué le Liban au moment où elle avait le plus besoin de rassembler les voix de la droite et celles de l’extrême droite pour espérer sauver son siège de députée.

En attendant, la guerre du Liban n’a jamais été qu’une guerre interconfessionnelle, la société française n’est pas en pleine islamisation et, surtout, Nadine Morano n’est plus députée…

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