Le coeur du réacteur

[Publié initialement sur Medium]

Il y a quelques mois, je publiais dans Latribune.fr un texte où j’évoquais l’impact radical de la transformation numérique de l’entreprise sur la chaîne de valeur telle que nous avons pu la connaître jusqu’ici. D’une succession d’étapes linéaires plus ou moins créatrices de valeur, nous passons progressivement à un enchaînement circulaire.

Boucle de valeur

Ce enchaînement circulaire représente l’écosystème dans lequel les clients constituent une moitié du cercle et l’entreprise et ses partenaires l’autre moitié. Les clients achètent le produit ou le service : dans cet acte même d’acquisition et dans l’usage qu’ils en font par la suite, ils fournissent à l’entreprise et à ses partenaires des données nécessaires pour l’amélioration du produit et/ou du service garantissant ainsi sa adaptation continue aux attentes implicites ou explicites du client. C’est donc au travers des processus et des données intrinsèquement liés au produit et/ou au service que la valeur “circule” entre clients et entreprises.

Mon texte était en partie inspiré par une conférence tenue en octobre dernier par John Newton, fondateur d’Alfresco (mon précédent employeur, éditeur open source de solutions de gestion de contenu collaborative). Depuis, j’ai eu l’occasion de lire deux autres développements très “inspirants”. L’un, publié sur Medium le 15 mars, est de Nicolas Colin sur les modalités nouvelles de domination d’une filière industrielle. L’autre est d’Henri Verdier sur ce que l’auteur appelait, déjà en 2010, la boucle de valeur.

Nicolas Colin, pour résumer son propos, souligne la disparition, du fait de la mondialisation et de la transition numérique, des effets amont et aval qui caractérisaient les chaînes de valeur classiques, celles linéaires que j’évoquais ci-dessus. L’ensemble de la valeur d’une filière se retrouve ainsi concentré dans l’acteur dominant qui a su tisser des relations fortes avec les clients tirant ainsi profit de la multitude.

Le logiciel au coeur de la boucle

Dans cette boucle de valeur, l’acteur dominant se connecte à ses fournisseurs, sous-traitants, sur-traitants et autres fournisseurs de services au travers d’un système d’information (un logiciel ou un ensemble de logiciels interconnectés). Ce système d’information doit être le plus ouvert possible pour garantir l’interopérabilité fluidifiant les processus et les transmissions de données avec ses partenaires. Le même acteur dominant se connecte à ses clients, à la multitude, au travers d’une autre facette du même système d’information, tout aussi ouverte.

Le constat fait il y a 5 ans par Marc Andreesen est que le “logiciel mange le monde” (Wall Street Journal). Tous les secteurs d’activités sont concernés : quels que soient le produit et/ou le service vendus, le logiciel en devient l’élément central. L’illustration la plus flagrante ces jours-ci est celle du secteur automobile qui met le logiciel au coeur de ses productions. Mes amis de l’Agence La vie moderne en parlent ici. Le symbole de cette révolution du secteur automobile est certainement le constructeur californien Tesla dont l’emblématique patron, Elon Musk, résumait ainsi la chose pas plus tard que la semaine dernière :

Nous avons réellement conçu le Modèle S pour que ce soit un ordinateur sophistiqué sur roues. Tesla est autant une entreprise de logiciel (“software”) qu’une entreprise de matériel (“hardware”).

Des hommes et du code

Mais si le logiciel est au coeur de la création de valeur dans l’économie transformée par le numérique, qu’y a-t-il au coeur du logiciel ? Le logiciel est une affaire d’êtres humains, des hommes et des femmes usant de leur intelligence collective pour concevoir des logiciels et les faire évoluer. Wikipedia définit le logiciel ainsi :

[c’]est un ensemble de séquences d’instructions interprétables par une machine et d’un jeu de données nécessaires à ces opérations.

Et ces instructions qui constituent le logiciel, la même source les définit ainsi :

Le code source est un texte qui représente les instructions qui doivent être exécutées par un microprocesseur. Le code source se matérialise souvent sous la forme d’un ensemble de fichiers textes.

Le code source est donc la somme des éléments constituant un logiciel. Ce code source est écrit par des êtres humains de manière collaborative. Un même “morceau” de code de source est, de nos jours, écrit-revu-modifié par plusieurs personnes la plupart du temps ne se trouvant pas au même endroit.

Le logiciel est le fruit d’une collaboration entre des femmes et des hommes qui peuvent être salariés d’un même employeur ou pas, ayant recours à une souche logicielle existante (open source ou pas) ou en partant d’une page blanche (développement spécifique), produisant un logiciel réutilisable par ailleurs librement (open source) ou selon des règles prédéfinies dans la licence (propriétaire).

Agilité à tous les étages

La boucle de valeur se “concrétise” donc par les logiciels qui permettent aux entreprises d’interopérer entre elles des processus et d’échanger des données et qui permettent aux mêmes entreprises d’interopérer des processus et d’échanger des données avec leurs propres clients. Le logiciel est donc au coeur de la boucle et les créateurs de logiciels sont, à leur tour, au coeur du coeur de la boucle. Ainsi, si l’on souhaite classiquement améliorer la qualité, maîtriser les coûts et réduire drastiquement les délais, il parait évident que c’est sur les processus de développement du logiciel et de son déploiement qu’il faut être en capacité d’agir et d’agir de manière radicale.

Je présenterai dans les prochaines semaines quelques éléments d’améliorations pris dans les meilleures pratiques du domaine. Mais notons d’ores et déjà l’importance d’outils permettant la collaboration entre développeurs ainsi que les outils permettant une agilité non seulement dans les développements, mais plus largement dans les opérations de conception, de développements, de tests et de déploiements à un rythme accéléré. Ce rythme d’évolutions s’est imposé pour les applications mobiles dont on ne compte même plus les versions tellement les évolutions se font rapidement pour répondre aux attentes des clients, mais aussi aux possibilités nouvelles qu’offrent les évolutions technologiques. Cette agilité dans les développements et déploiements d’applications mobiles est nécessaire dans les autres domaines informatiques. Ne pas allez sur ce chemin c’est se condamner à manquer le rendez-vous de la transformation numérique qui est d’ores et déjà au coeur de la croissance du chiffre d’affaires quel que soit le secteur. Pas de cercle vertueux sans logiciel vertueux et pas de logiciel vertueux sans collaboration vertueuse à l’intérieur de l’entreprise (entre développeurs, concepteurs, etc.), mais aussi à l’extérieur (clients, sous-traitants, sur-traitants, etc.).

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