En novembre dernier je publiais un billet intitulé Le jour où je suis devenu candidat. J’y expliquais comment je m’étais retrouvé, le soir du 21 novembre 2013, en dixième place de la liste du Parti socialiste menée par Johanna Rolland en vue de l’élection municipale de Nantes.
Cette liste initialement uniquement socialiste s’est élargie, le 10 janvier 2014, aux formations politiques de gauche alliées au PS dès le premier tour ainsi qu’à des personnalités sans étiquettes politiques. La campagne, qui avait commencé pour moi à l’automne s’est progressivement intensifiée jusqu’au 23 mars 2104, le dimanche du premier tour, qui a vu notre liste, Nantes a de l’avenir, arriver largement en tête (34,5%). Puis le 25 mars 2014, la Liste écologiste et citoyenne menée par Europe Ecologie Les Verts a fusionné avec la liste Nantes a de l’avenir confortant ainsi une victoire nette (55,21%) le 30 mars au soir.
Le 135e maire de la Ville de Nantes
Le conseil municipal résultant des scrutins du 25 et 30 mars s’est réuni le 4 avril : Johanna Rolland a été installée dans son rôle de 135e maire de la Ville de Nantes. A 34 ans, elle est la plus jeune maire de l’histoire de Nantes. Elle est aussi la mieux élue des candidats socialistes des grandes villes françaises et dans le contexte national actuel, cet exploit est à noter même si, au final, Johanna Rolland est désormais le maire de tous les Nantais qu’ils aient voté ou non, pour sa liste ou non.
En tant que conseiller municipal, j’ai voté lors du « troisième tour », c’est-à-dire l’élection du maire de la ville par les conseillers municipaux. Ce fut un moment de grande émotion et d’honneur de participer à ce scrutin. A titre personnel c’était aussi important pour moi que le premier vote auquel j’ai pu participer en France. Naturalisé français en 1994, j’ai dû voter la première fois en 1994 ou 1995 et pour quelqu’un venant d’un pays où les scrutins sont au pire inexistants et au mieux inutiles, cette « première » personnelle au milieu des années 1990 était un événement marquant, chacun pourra donc deviner l’importance, pour moi, du vote du 4 avril dans l’enceinte du conseil municipal nantais. Ce vote était aussi important pour moi car je l’ai vécu comme un aboutissement, le républicain que je suis n’ose dire le couronnement. L’aboutissement d’une aventure riche en échanges et en rencontres, celle de la campagne que nous avons tous vécue de manière intense : le contexte national n’était pas spécialement favorable, mais nous savions que nous pouvions nous appuyer sur un bilan nantais solide et sur un plan de campagne méthodique nous mettant en situation d’échanges directs avec les citoyens (assises, porte-à-porte, etc.).
En effet, au-delà de la parfaite planification des temps forts de la campagne et du professionnalisme avec lequel l’équipe de campagne a orchestré les actions militantes, cette période a été une formidable occasion permettant aux militants de mieux se connaître et certainement de mieux connaître leurs quartiers et leurs habitants. Des liens indéfectibles s’établissent dans ces moments-là…
Le conseil municipal du 4 avril était aussi l’occasion pour le nouveau maire d’annoncer la composition de l’exécutif avec lequel elle travaillera tout au long des six années du mandat qui s’ouvre.
Dialogue civique
J’ai eu l’honneur (et je pèse mes mots) d’être désigné adjoint du maire en charge de la « co-construction » et du « dialogue citoyen ». La co-construction c’est l’action de construire ensemble un projet c’est-à-dire en impliquant les différentes parties prenantes : citoyens, organisés ou non, entreprises, services publics, etc. Le dialogue citoyen (civique serait encore plus juste) est le cadre plus général dans lequel s’inscrit cette action : un cheminement commun au travers du débat raisonné entre citoyens.
Pour un premier mandat électif, je dois dire que je ne m’attendais pas à un rôle d’adjoint et encore moins à une délégation aussi « politique » dans le sens noble du terme comme art ou science de la cité. Et la responsabilité est d’autant plus importante que le dialogue citoyen a servi de pierre d’angle dans la construction du projet Nantes a de l’avenir présenté avec succès aux Nantais durant la campagne et il servira de méthode pour le mandat qui commence.
Notre campagne a commencé par trois assises citoyennes en présence de 100 à 200 personnes à chaque fois. Ces personnes participant à des brainstormings où chacun apportait librement ses idées sur la thématique de l’assise (« Ville active et créative », « Ville durable et désirable », « Ville facile, pour tous »). Il y a aussi eu des réunions plus restreintes sur des sujets plus précis (numérique, santé, etc.) abordés en détail avec des spécialistes (professionnels, etc.). Le résultat de toutes ces rencontres a été collecté et retraité ensuite par l’équipe de campagne de manière à constituer le détail du projet ainsi construit autour de l’ossature préalablement définie par Johanna Rolland dans le respect des valeurs défendues par les partis composants la liste.
Il s’agira donc dès à présent de mettre en place concrètement ce renouvellement des pratiques politiques que Johanna Rolland n’a cessé d’appeler de ses voeux durant la campagne. Dans le projet rendu public le 3 février 2013, celle qui n’était encore que tête de liste de la gauche rassemblée s’adressait aux Nantais en les invitant à voter pour :
Une nouvelle gouvernance s’appuyant sur l’exemplarité et le collectif. Le collectif en tant qu’association des citoyens aux décisions, leur engagement dans des démarches de co-production sera une exigence quotidienne en toute clarté et sans démagogie.
Cette volonté a été à nouveau rappelée dans son discours d’investiture, le 4 avril, le nouveau maire de Nantes rappelait le contexte politique :
[…] Ce nouveau cycle […] passera par le renouvellement des pratiques politiques : c’est indispensable. Les électeurs ont exprimé un message fort lors de ces élections, dans tout le pays, par l’abstention et par les votes extrêmes. […] Je ne me résigne pas moi à ce qu’une partie de la population se dise que « non la politique ne sert à rien, que ça n’a pas d’impact dans la vie quotidienne » […].
Feuille de route
Johanna Rolland, dans le même discours, établissait une feuille de route qui se précisera dans les prochaines semaines et dont elle résumait les grandes lignes ainsi :
Renouveler les pratiques c’est […] construire avec les habitants. La force de notre projet ce n’est pas seulement que c’est un projet pour Nantes, mais un projet qui vient de Nantes. Bien sûr cela se fera dans le respect du rôle des élus à qui il appartient de fixer le cadre de discussion, à qui il appartient in fine d’assumer les décisions […]. Je suis convaincue que notre projet, notre action, sera plus innovante, plus ancrée dans le quotidien des Nantaises et des Nantais, plus imaginative, plus apte à répondre aux défis d’aujourd’hui […] si nous savons fabriquer la Ville avec les habitants.
[…] Nous organiserons des débats autour des enjeux majeurs de notre territoire, généraliserons les démarches de co-construction dans les projets urbains, mettrons en place les budgets d’investissement participatif pour des projets de proximité, en lien avec les conseils de quartier. Mais nous développerons également le droit à l’initiative citoyenne qui viendra nourrir nos débats, ici, plusieurs fois par an, dans l’enceinte du Conseil municipal.
C’est donc de ce chantier-là que j’ai la charge avec le maire, son cabinet, les autres élus de la ville et les services de la mairie : faire en sorte que les citoyens soient effectivement impliqués dans la création du bien commun et travailler ainsi à « l’élévation du pouvoir de chacun par le collectif » [1].
[1] selon la formule de Jacques Donzelot dans Le chantier de la citoyenneté urbaine (in Esprit, mars-avril 2011), j’y reviendrai plus tard…
Joli chemin parcouru depuis le 1er atelier militant dédié à l’élaboration du projet…Toutes mes félicitations camarade!