L’Eglise catholique de France a proposé un texte rédigé par le Cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris, sous forme de prière pour la France en ce 15 août 2012, jour de l’Assomption commémorant dans la tradition chrétienne la fin de la vie terrestre de Marie. L’annonce de cette prière a été accompagnée par une interview explicative du Cardinal Barbarin, archevêque de Lyon et primat des Gaules, où le mariage entre personnes de même sexe occupe l’essentiel de l’échange avec le journaliste.
Les associations et personnalités favorables au mariage entre personnes de même sexe se sont saisies de cette prière et de l’interview l’accompagnant pour dénoncer la position de l’Eglise catholique de France sur ce sujet. Les personnalités et mouvements laïcs de gauche ont, quant à eux, vu dans cette prise de position une infraction aux principes de la laïcité.
Sans rentrer dans tous les détails des différentes réactions (voir ici et ici pour plus de détails) rappelons simplement que le programme du candidat François Hollande incluait explicitement le “mariage pour tous” et c’est ce programme qui l’a mené à la victoire du 6 mai 2012.
Pour allez plus loin dans la réflexion que les 140 caractères qu’atorise Twitter (les multiples insultes qui illustrent ce débat sur ce réseau social sont symptomatiques de l’état de notre société), voilà quelques éléments que je n’ai pas vu mis en avant ni par les uns ni par les autres !
Je pars d’un constat simple : les règles éthiques que l’Eglise catholique édicte ne s’imposent qu’aux catholiques, même pas à tous les chrétiens (orthodoxes et protestants ayant leurs propres principes). A partir de là pourquoi tout le monde s’offusquent dès que l’Eglise catholique émet des idées un tantinet en dehors des clous de ce qui est communément admis dans la plupart des composantes de notre société (ou du moins par celles qui ont la plus importante capacité à se faire entendre) ? Si le rejet du mariage entre personnes de même sexe est un principe de l’Eglise, ce principe ne s’impose nullement aux non-chrétiens. Ce principe, s’il pose des problèmes, cela concernera en premier lieu les personnes homosexuelles faisant partie de l’Eglise et se sentant obligés de respecter les règles qu’elles édictent. Il est donc loin de concerner toute la société.
On rétorquera peut être qu’un tel principe sort des “landmarks” de la laïcité telle qu’elle a été instaurée en France avec la loi de 1905 séparant l’Eglise et l’Etat. Ca aurait été le cas si l’Eglise avait un tel pouvoir sur l’Etat que le principe qu’elle édicte devenait applicable pour tous les citoyens au travers de l’autorité de la République. Or cela est loin d’être le cas et on ne peut, dans une République laïque, interdire à un groupe d’hommes et de femmes d’énoncer des principes qu’il considère comme justes tant que ceux-ci ne créent pas de troubles à l’ordre public. Il ne semble pas que la prière ou les interviews militant contre une cause telle que celle du “mariage pour tous” en soient arrivés à troubler l’ordre public, tout au plus troublent-ils les échanges sur Twitter dont la sérénité n’est dans tous les cas pas la caractéristique première.
Mais on ne peut s’arrêter à ce stade dans le raisonnement car l’Eglise catholique elle-même estime qu’en intervenant dans le débat sur le “mariage pour tous”, elle essaie de défendre une vision de la famille qu’elle estime être la vision juste. L’Eglise catholique oublie ainsi que ce qui a été proposé par le candidat socialiste à la société française, c’est l’autorisation du mariage civil aux personnes de même sexe et non pas l’accès de ces mêmes personnes au mariage religieux, ce sacrement que les catholiques et même leur Eglise n’évoquent pas ou peu. En effet, je ne comprends pas pourquoi l’Eglise catholique ne se content pas de réaffirmer que ce qui compte pour elle en premier lieu c’est le sacrement du mariage qui se fait à l’église, par le biais d’un prêtre et en présence et devant Dieu. C’est de ce mariage-ci que l’Eglise s’occupe en priorité et non pas du mariage civil qui pour elle ne devrait avoir aucune importance ou alors toute relative. Dire cela pour un chrétien ce n’est pas nier l’importance de la République et des actes civiles qu’elles administre. Dire cela c’est simplement remettre chaque chose sur le plan qu’elle ne peut quitter. Ainsi le “mariage pour tous”, c’est en réalité le “mariage civil pour tous”. D’ailleurs ça aurait pu s’appeler l’”union civile” de manière à tourner la page de 1792 où le nouvel ordre des choses si’nstallait dans la confrontation (fut-elle nécessaire à l’époque, mais c’est un autre sujet) entre l’ancien régime et la République naissante. Ainsi cette union civile serait d’emblée ouverte à tous et distincte de la notion de “mariage” que nombre de nos contemporains rejette du fait même de sa connotation religieuse même dans sa version républicaine. Au passage, cette solution réglerait du même coup l’héritage du PACS qui n’aura alors plus de sens.
Mais le plus étonnant est que l’Eglise catholique commet encore de grossières erreurs de communication : utiliser la Bible pour donner des arguments censés convaincre des non-croyants, je dirai “what the fuck : c’est comme ça que vous pensez marquer des points et convaincre ?!” Sur ce sujet précis, il y aurait pourtant tellement d’autres arguments à mettre en avant ! J’attends impatiemment le débat sur “la fin de vie” et j’espère, vraiment, que des arguments plus universels, et donc plus convaincants pour le plus grand nombre, soient utilisés. Mais je crains bien d’être déçu… et pas seulement parce que l’Eglise utilise les mauvais arguments, mais aussi parce que notre société “ne fait plus dans la dentelles”, il n’y a qu’à voir le niveau des argumentaires sur le mariage pour tous, pour s’en rendre compte, et pas seulement sur Twitter !
Au passage, pour montrer le caractère biaisé de ce débat : on n’a pas entendu les autres religions se prononcer sur le mariage pour tous ou alors personne n’a cru bon reproduire leurs communications et encore moins la critiquer comme ce fut le cas avec la prière d’André Vingt-Trois ! Alors soit on considère que l’Eglise catholique a encore un poids et alors elle seule mérite qu’on contre-carre ses arguments, soit les autres religions ne se sont pas prononcés (peut être pensent-elles comme moi que ce mariage républicain ne les concernent pas), soit enfin le mariage pour tous est une excuse pour attaquer l’Eglise catholique au nom d’une laïcité de combat, à mon sens, mal comprise…
Appendice :
Un dernier point enfin : les adversaires de l’Eglise ont naturellement “oublié” ce que réclame cette fameuse prière… On y lit notamment un appel à plus de solidarité en cette période de crise économique. On y lit aussi un appel à mettre en avant le bien commun en le faisant passer avant les intérêts particuliers. Un appe implicite aux autorités politiques pour poursuivre une politique (fiscale ?) favorable aux familels et aux enfants (donc à la natalité, point où la France fait mieux que la concurrence, ie : l’Allemagne). Il y a enfin ce dernier pointoù l’on met en avant les enfants et leurs parents. Les parents sont explicitement signalés comme “un père et une mère”, point sur lequel les défenseurs du mariage pour tous ne sont pas d’accord et c’es leur droit comme c’est le droit de l’Eglise d’exprimer sont point de vue… et le peuple tranchera, et il a trancher. Mais on notera aussi qu’on exige que les enfants “cessent d’être les objets désirss conflits des adultesbénéficier einement de l’amour”. Et sur ce derneir point, je doute que qui que ce soit se prononce négativement…